10.07.1915 – Eugène Pambouc à sa famille.
Chers parents,
Après avoir embarqué à Brest, mardi à 6 heures du soir, me voici arrivé ici, vers 9 heures hier au soir. Je suis dans l’est. Je viens de me laver dans la Moselle. J’ai entendu et entends encore le canon, surtout hier au soir. Il tirait sur nos avions qui montaient au-dessus des lignes ennemies. J’ai vu un avion français et un boche se battre. J’entendais marcher la mitrailleuse, que de chemin parcouru. Je suis passé à la Brohinière ; je suis parti sur Paris. Je fus loin, très loin. Je rebrousserai chemin et je vins vers Poilay (Lorraine) puis à Courtalain Saint Pellerin, c’est la Touraine, Châteaudron, Lutry de Lunois (Beauce) Péronville sonne 6 heures. Patay, Briey, Villeneuve d’Indre ! Orléans, Montargis, Châteaurenard ! Voici la Bourgogne ! Triguères ! Courtenay ! Subligny, Villeroi ! C’est la rivière l’Yonne ! C’est Sens ! Sens Est ! La Malay le Petit ! Theil-Cerisiers, voici Foissy ! Bagneaux, Vannes ! Troyes ! Vauchonvilliers, Vessains ! Meilleray, Vendeuvre… Etc. …
Je n’ai pas été trop malheureux à venir ici. Je ne peux dire où je suis ici. Je viens de manger ma première soupe depuis mardi matin. C’était bon !
Le colonel nous a passé en revue. Sa figure m’a fait une bonne opinion de lui. Nous sommes dispersés mais nous pouvons nous voir. Mes abonnés d’amitié, mes amis, ne m’ont point renié… Il faut que je vous dise que j’ai vu le village de Domrémy. Il faudrait un livre pour vous raconter ce que j’vu. Les beaux pommiers, les belles vignes ! La belle Provence ! Ce qui nous faisait quelque chose, c’était de voir les gens nous acclamer et nous saluer. Ce que disent les journaux à propos du bois Leprêtre et environs est la vérité. La lutte est chaude. Il fait chaud.
Comment cela va-t-il chez nous ? Les maisons, les gens ? Je pense à vous, je pense à tous. Dites bonjour à tous et à Chez Languille. Je n’ai pas de goût à écrire aujourd’hui, je suis fatigué. Je vous embrasse.
P.E – 44ème Colonial – 2ème Compagnie.